MATIÈRE ET PARTICULES
La matière se dévoile
Depuis les prémices d’une nouvelle physique dans les collisions de particules jusqu’à la course à l’ordinateur quantique, en passant par d’anciennes routes du marché de l’art dévoilées par la spectroscopie, la matière fourmille de mystères que la recherche tente d’élucider.

L’étude de la matière a permis de belles avancées scientifiques, notamment l’élaboration de clés de compréhension du processus de formation des noyaux atomiques en jeu dans les étoiles, ainsi que l’existence d’un univers sombre et de sa matière noire, le tout dévoilant l’apparition d’une nouvelle physique.
« Un certain nombre de résultats mesurés lors d’évènements très rares sont des signes de l’existence d’une probable nouvelle physique. Nous cherchons à mieux comprendre l’aspect d’unification des particules et des forces et à vérifier s’il existe de nouvelles symétries : une super-symétrie par exemple », indique Reynald Pain, directeur de l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules.
Parmi les révolutions en cours, la physique quantique continue d’attirer les regards. Si cette dernière date du début du siècle dernier et a permis aux scientifiques de comprendre et d’élaborer les objets utilisés aujourd’hui (lasers, transistor, etc.), on parle volontiers depuis quelques années d’une physique quantique 2.0.
« Il existe une focalisation au niveau mondial. Nous arrivons à un moment clé qui consiste à manipuler de façon cohérente des systèmes quantiques que l’on connaît bien, tels que les photons, les atomes, les molécules ou les électrons, soit individuellement, soit collectivement. De nombreuses études fondamentales s’orientent aujourd’hui vers l’exploitation de ces systèmes en tant que supports à l’information quantique (les bits quantiques, Ndlr), afin d’améliorer considérablement la sécurisation des liens de communication et l’efficacité des calculateurs. On parle alors de communication et de calcul quantiques », explique Alain Schuhl, directeur de l’Institut de physique.
Les travaux à l’échelle moléculaire se sont également imposés sur le devant de la scène avec la multiplication de partenariats entre chercheurs et institutions. New AGLAÉ, installé sous le Louvre, est l’unique accélérateur de particules dans le monde dédié à l'étude d'objets du patrimoine et dont la mise à jour récente a permis d’améliorer l’imagerie chimique à l’échelle micrométrique.
« L’approche moléculaire apporte vraiment des informations supplémentaires. Nous pourrons ainsi voir comment vieillit le pigment d’une toile ou encore retracer les routes commerciales des marchands d’art de l’Antiquité à partir de l’analyse de statuettes mésopotamiennes », rapporte Jacques Maddaluno, directeur de l’Institut de chimie.
La recherche
Quand le CO2 deviendra méthane
Principal responsable du réchauffement climatique, le CO2 rejeté par les activités humaines pourrait un jour être recyclé facilement en une source d’énergie. C’est ce que promettent les travaux d’une équipe du Laboratoire d’électrochimie moléculaire (LEM)1CNRS/ Université Paris Diderot qui a mis au point un procédé capable de transformer ce gaz à effet de serre en méthane, constituant principal du gaz naturel, simplement à l’aide de la lumière solaire et d’un catalyseur moléculaire.
Respect de l’environnement, un fil conducteur
Contrairement aux autres méthodes de transformation du CO2 utilisées jusqu’ici, celle-ci est beaucoup plus respectueuse de l’environnement : la réaction se réalise à température et pression ambiantes et fait appel au rayonnement du Soleil comme seule source d’énergie. Ce principe est comparable à celui de la photosynthèse, au cours de laquelle les plantes transforment le CO2 grâce à l’énergie solaire. Et le catalyseur employé est à base de fer, un métal abondant et non toxique. « Pour toutes ces raisons, le développement à grande échelle de notre procédé est un objectif que l’on souhaite poursuivre », souligne Marc Robert, du LEM.
À court terme, une production de monoxyde de carbone
Dans ce but, les chercheurs tentent maintenant de comprendre la catalyse du CO2 dans ses moindres détails. D’ores et déjà, la première phase, celle de la transformation du CO2 en monoxyde de carbone, est parfaitement bien décrite. Les chimistes ont d’ailleurs conçu un dispositif dédié uniquement à cette réaction, ce qui a valu à Marc Robert et à ses collègues Jean-Michel Savéant et Cyrille Costentin, de recevoir le prix du ”Challenge des molécules essentielles” de la société Air Liquide. Le monoxyde de carbone est une matière première importante pour l’industrie chimique et, à court terme, l’équipe du LEM compte développer un réacteur capable de produire ce gaz en grande quantité.
Nature, juillet 2017
Sources :
Ces chimistes à l’assaut du CO2
Vers une production de “carburant solaire”
Un pas important vers le transistor quantique
Des physiciens ont conçu une porte quantique capable de bloquer ou de laisser passer des photons un à un.
La topologie au rendez-vous du prix Nobel de physique
Grâce à cette branche des mathématiques, les trois lauréats du Nobel de physique 2016 ont pu expliquer des changements d’état de la matière dans des milieux très fins.
New AGLAÉ, un instrument unique au monde
Les performances de l'accélérateur de particules destiné à l'étude d'œuvres d’art ont été considérablement améliorées.
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Et aussi
Innovation
En bref

Le projet Plasma Jets, porté par le Groupe de recherches sur l’énergétique des milieux ionisés1GREMI, université d’Orléans/CNRS a reçu le Prix académique du concours Cosmetic Victories, lors de Cosmetic 360, le salon international de l’innovation de la filière parfumerie-cosmétique. Cette distinction salue l’excellence de la recherche dans un secteur où le CNRS fédère plus de 50 laboratoires avec le groupement de recherche COSM’ACTIFS et assure un leadership sur la valorisation des travaux avec la création d’un “Focus Transfert CNRS” Cosmétique, riche de 131 brevets.
Le programme de prématuration du CNRS, doté de 2 millions d’euros par an, soutient les premières étapes de développement de projets à fort potentiel d’innovation et ce jusqu’à la preuve du concept. En amont de l’action des SATT, il sélectionne et finance une vingtaine de dossiers par an. La solidité de la propriété intellectuelle, l’intérêt marqué des industriels, les nombreuses distinctions ou les retombées médiatiques réservées aux projets, soulignent la pertinence d’un programme mis à la disposition des laboratoires.